Quand s'arrêter
Est-il temps d'envoyer le manuscrit de votre livre ? Ou comme dirait Coluche : jusqu'où faut-il s'arrêter ?
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Écrire est un acte thérapeutique.
Voilà, c’est dit. Par cette phrase, « écrire est un acte thérapeutique », je vous propose un point de vue sans doute un peu radical, mais qui a le mérite d’être fertile en réflexions.
Je commence par argumenter un peu :
- Si votre livre est un roman : vous allez sans doute faire vivre vos fantasmes à vos personnages, ou alors vos cauchemars. Autant dire qu’à travers eux, vous allez explorer vos espoirs et vos peurs. Cela vous permettra de mieux connaitre vos limites et d’apprivoiser vos angoisses.
- Si votre livre est un essai : il sera l’occasion d’organiser votre pensée, d’explorer vos idées en profondeur et de les confronter à l’opinion du public. Cette confrontation est une sorte d’épreuve du feu qui vous apprendra inévitablement beaucoup de choses sur vous-même.
À quel moment convient-il d’arrêter une thérapie ?
Je ne saurais vraiment pas répondre à cette question, même si vous me proposez votre livre à lire. Après tout, dans le cadre d’une thérapie, ce n’est pas au psy, mais au patient, de décider quand ça doit s’arrêter.
Je voulais simplement attirer votre attention sur le fait que le métier (ou l’occupation) d’écrivain n’a rien d’anodin. La réponse à la question « quand s’arrêter » ne concerne pas seulement votre livre. Elle vous concerne, vous !
Votre livre vous représente.
Bien entendu, vos lecteurs ne vous adresseront pas forcément que des louanges. Ils n’auront pas conscience du travail monumental que vous aurez fourni pour terminer votre livre. Ils se moqueront éperdument du fait que votre version finale est dix fois mieux que ce que vous aviez obtenu au premier jet.
Vous serez jugé en fonction de la qualité de votre livre. Si c’est en bien, tant mieux. Mais si c’est en mal ?
Et puis, au diable les lecteurs ! Parlons de vous. Votre livre va représenter une étape dans votre vie, une sorte de petit caillou blanc que vous aurez semé sur votre chemin. Quelle opinion en aurez-vous, vous-même, dans quelque temps ? Serez-vous fier de vous ou aurez-vous honte ?
Et puis, au diable vous ! Pensez à votre éditeur ! (c’est-à-dire à moi, si vous me soumettez votre livre). Je vais passer des heures à vous lire et à tenter de relever vos faiblesses de style et de construction. Que croyez-vous que je vais vous envoyer comme commentaire, si j’ai le sentiment que votre livre est bâclé ?
Je ne veux pas vous inciter au perfectionnisme, ça serait mauvais pour votre karma. Mais je vous invite à vous poser la question : êtes-vous allé au bout de vous-même ?
Je vous reproduis texto ce que j’ai envoyé récemment à deux auteurs dont le texte me semblait perfectible :
- Ne soyez pas impatient d’être publié. Soyez impatient d’être allé au bout de votre travail. Le reste appartient beaucoup au destin.
et
- Je suis bien placé pour connaître la lassitude
qui s’installe au bout de quelque temps quand on en bave pour finir un livre.
Si ce travail te gave et que tu ne te sens plus la force d’y travailler encore,
je respecte. Mais c’est sans doute dommage. C’est dommage d’avoir déjà fourni
tout ce travail et de caler en cours de route. C’est dommage de publier ce bouquin
à ce stade, sachant que d’une certaine façon, un livre nous représente, qu’il
est une image de nous-même (au moins à nos propres yeux, si ce n’est aux yeux des
lecteurs). C’est dommage de ne pas profiter de l’occasion que représente ce travail
supplémentaire pour améliorer tes techniques littéraires, parce que c’est là, maintenant,
que tu as le plus à apprendre de toi-même, que tu peux vraiment affiner et perfectionner
ton style, que tu peux te dépasser, que
tu peux progresser suffisamment pour devenir vraiment un écrivain. Et si tu vas
au bout de ça, tu constateras que tu auras vraiment gagné quelque chose d’important
dans ta façon d’écrire et ton deuxième livre sera dix fois plus facile que le
premier à écrire. La question que je te pose est : fais-tu de l’écriture en
dilettante, ou veux-tu vraiment en faire une occupation qui va illuminer ta vie ?
Plonges-tu ton orteil dans l’eau froide, déjà prêt à te dire « brrr. je me
baignerai une autre fois », ou prends-tu ton élan pour y plonger tout entier,
quitte à devoir nager avec toute ton énergie pour éviter de geler sur place ?
Cela étant dit, quand tu en arrives au point où tu en as vraiment marre et que le travail sur ce bouquin devient trop pénible, il faut s’arrêter, quitte à démarrer tout de suite un autre livre. Un livre n’est bon que si son auteur a pris du plaisir à l’écrire et à le corriger.
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